Travailler moins pour gagner pareil

Publié le par doug

La Loi

On ne le répétera jamais assez, le temps de travail légal, c'est 35 heures par semaine.

Il y a possibilité d'aménager ce temps de travail sur l'année, c'est-à-dire qu'une semaine de 40 heures peut être compensée par une semaine de 30 heures. Cela n'enlève rien au fait qu'une heure travaillée doit être soit payée, soit rendue. En aucun cas votre employeur ne peut exiger de vous que vous donniez 5 ou 10 heures de votre temps libre sans la moindre contre partie. C'est pourtant ce que font les SSII, d'une manière hautement sournoise.

Leur stratégie

Vous remarquerez qu'ils font bien attention à ne pas vous obliger à faire toutes ces heures. Si ils le faisaient, ils perdraient des procès aux prud'hommes. Ils se contentent de faire régner une ambiance qui soit telle que vous vous sentiez obligé de rester une heure de plus le soir gratuitement, une stratégie sournoise qui repose sur deux axes :

  • Pas d'horaires imposés, on est une boîte cool voyons ! Vous croyez vraiment que ces rapaces vous laissent libre des horaires pour vous rendre service ? Ils le font parce que ça fait partie de leur stratégie contre vous. Si ils avaient des horaires définies 8.30-12 et 13.30-17.30, les salariés auraient une ligne de défense facile à tenir : respecter les horaires, rester éventuellement 5 minutes de plus pour finir une bricole mais pas davantage. Le manager serait alors désarmé : comment voulez-vous qu'il vous reproche de partir à 17.35 alors que le règlement dit 17.30 ? Avec des horaires imposées, il est plus difficile à l'employeur de vous arnaquer.
  • Le management laisse planer la terrible menace des horaires imposées "comme dans d'autres boîtes ou d'autres services". Ah, ça, ça nous pend au nez si on ne travaille pas assez. Les horaires flexibles sont présentées comme un avantage donné aux salariés qui, en contrepartie, peuvent bien donner une heure de plus tous les jours... La seule contrepartie qu'il me paraît normal de donner, c'est d'accepter de rester une ou deux heures de plus le jour où il y a un bug à corriger d'urgence. Les deux heures devant bien entendu être récupérées par la suite. Si l'arrangement est celui là, c'est gagnant-gagnant, pas besoin de donner des heures en plus à l'entreprise. Avec des horaires imposées, l'heure, c'est l'heure, le bug attendra le lendemain (ne pas hésiter à balancer ça à la figure du manager qui vous fait ce laïus en faisant semblant de se mettre de votre côté).
  • Des remarques assassines du genre "bon après-midi" à celui qui s'en va à 18 heures. C'est seulement de cette façon qu'ils parviennent à vous faire travailler autant : personne n'ose être le fainéant improductif qui part avant les autres. Ils créent ainsi un climat qui vous oblige à travailler plus gratuitement. Pour se soustraire à cela, il faut soit une force de caractère importante, soit une stratégie efficace.

Les réactions

Pour établir une stratégie de défense, il convient d'étudier les réactions des autres. Il existe plusieurs catégories de personnes :

  1. Les faillots qui arrivent juste avant le chef et qui se barrent en même temps où juste après. Ceux là sont sans intérêt, ce n'est pas sur eux que l'on peut s'appuyer. Les imiter est utile quand vous êtes en stage ou en période d'essai. Sinon, laissez ces crétins failloter pour finir chef de projet dans 20 ans.
  2. La masse qui ne sait que faire, ils travaillent plus gratuitement en réponse à la pression sociale sans savoir comment s'en affranchir. Ceux là sont intéressants car ce sont des alliés potentiels. Si vous leur proposez une stratégie efficace et sans trop de risques, ils vous suivront
  3. Ceux qui testent le système. Ils partent le plus tôt possible. 18h25, personne ne dit rien, ils tentent 18h20 puis 17h45... ah, ça coince, on revient à 18h. Pareil pour les heures d'arrivée.
  4. Les grandes gueules qui s'en sortent bien. Ce peut être des syndicalistes au sang chaud, ou alors des gens qui ont toujours une bonne excuse pour partir à 17 heures : un gamin à aller chercher, un cours de judo ou de piano... tous les soirs, il y a quelque chose. C'est une bonne stratégie. Pour une raison qui m'échappe, le fait d'avoir une raison, même bidon, permet de faire accepter plus facilement des choses aux gens.

NB: Le mot "parce que" est un mot magique, même quand il n'est suivi par rien de pertinent. Dans l'absolu, que vous partiez une heure avant tout le monde pour aller chercher un gosse ou simplement parce que vous avez envie de boire un coup ne devrait rien changer. C'est votre vie personnelle, à vous de vous organiser. Telle est la réponse que donnerait un chef compétent. En SSII, on ne cherche qu'à tirer un maximum sur la corde.

Votre cas

Si vous vous demandez comment agir, c'est que vous appartenez à la deuxième catégorie. Pas assez grande gueule pour entrer dans la troisième, trop timide pour entrer dans la quatrième. Personne ne vous juge, il faut un certain tempérament pour appartenir agir de cette façon. Pour faire partie de la catégorie 4, il faut être capable d'encaisser dans la plus grande indifférence les remarques cinglantes de votre hiérarchie et avoir un peu de répartie pour y répondre de manière appropriée selon l'agresseur. Pour la catégorie 3, il faut mentir comme un arracheur de dents avec un naturel impeccable, ce n'est pas non plus facile. Dans mon cas, ce fut le résultat de plusieurs mois d'apprentissage.

La bonne stratégie

Le must, c'est la catégorie 3. Tant que vous n'en êtes pas capable, la solution consiste à vous positionner juste derrière les combattants de catégorie 4 : ils tentent le départ à 18h15 ? Partez juste après eux, à 18h18. Partez parmi les premiers, mais pas le premier. Cela vous permet de participer au mouvement, de vous engouffrer dans la brèche qu'ils ouvrent sans pour autant combattre en première ligne. Pas très courageux, à première vue. C'est toujours mieux que de se comporter comme un mouton à partir à 19 heures ainsi que le voudraient vos chefs. C'est un acte de résistance bien plus modeste que celui qui consiste à partir héroïquement en premier à 18h, certes, mais acte de résistance tout de même. De toute manière, vous ne pouvez pas faire une chose pareille alors que vous venez d'arriver. Il faut au minimum 6 mois d'ancienneté.
Quand vous aurez pris un peu d'aplomb, vous pourrez entrer dans les catégories 3 et/ou 4.

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S
Intéressant ton blog !
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T
C'est tellement vrai, fine analyse , merci pour ces post !
F
ah ah excellent
A
Merci