Vaines menaces

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En SSII plus encore qu'ailleurs, les costars cravates appuyés par les RH aiment proférer des menaces voilées pour nous faire rentrer dans le rang. Il y aurait ainsi une liste noire que les SSII se partageraient entre elles, le monde serait petit et le moindre acte de rébellion de votre part se traduirait par une trace noire qui vous suivrait à vie dans votre dossier.

En gros, bossez jour et nuit, acceptez n'importe quoi, sinon, gare à vous !

Ils ne vont évidement pas vous dire que vous n'avez qu'à faire capoter un entretien si vous n'avez pas envie de faire une mission, que si les choses se passent mal, vous n'aurez qu'à mettre les voiles en direction de la SSII d'en face qui vous accueillera à bras ouverts et qui ne saura rien de ce que vous aurez fait ici.

Ils veulent évidement vous faire sentir qu'ils vous tiennent, que vous pouvez être fiché, qu'ils ont le bras long et qu'ils ne vaut mieux pas se les mettre à dos. Rien de tout cela n'est vrai.

"Si vous essayez de saboter un entretien, ça se voit !"

Le genre d'âneries typique du commercial ou de la RH. Fort heureusement, ces gens là ne sont souvent pas bien malins, ce qui arrange bien nos affaires. Persuadés d'avoir des détecteurs de mensonges embarqués, acquis grâce à leur inestimable expérience, ils n'envisagent même pas qu'ils puissent ne pas détecter un sabotage.

Ils ignorent superbement le problème propre à toute personne ou organisation luttant contre une activité clandestine : on ne peut compter et étudier qualitativement que l'activité que l'on détecte, pas celle qu'on ne détecte pas.

Prenez l'exemple du trafic de drogue. Le flic bien pensant vous dira que tous les malfaiteurs se retrouvent tôt ou tard sous les verrous. Oui ! 100% des malfaiteurs qu'il a eu en face de lui et identifiés comme tels ont fini en taule ! Ça ne dit pas combien sont passés entre les mailles du filet. Deux fois plus, dix fois plus ? Impossible à dire.

Il en va de même pour les mensonges en entretien et les sabotages d'entretien client. Il est évident que le nombre de ceux qui passent à l'as sont largement sous estimés. Les menteurs et les saboteurs sont plus ou moins doués, plus ou moins gourmands et plus ou moins prudents. Bien sûr, il ne faut pas prendre tous vos interlocuteurs pour des idiots, ils ont des moyens de faire certaines vérifications, vous ne pouvez pas leur faire avaler n'importe quoi.

Il est évident que si vous insultez votre client, que vous lui dîtes que vous n'avez pas du tout envie de vous taper deux heures de route pour faire son projet à la con, vous allez avoir du mal à convaincre votre commercial que vous étiez motivé à fond pour cette mission mais que l'entretien a malheureusement échoué.

Il y a un art pour faire échouer un entretien, nous pouvons en débattre ici : http://travailler-en-ssii.over-blog.com/l-art-de-ne-pas-faire-une-mission.html

Si vous faîtes bien les choses, les chances d'être détecté sont faibles. De plus, pour que la crèmerie puisse vous reprocher quelque chose devant un tribunal (pour vous licencier), elle doit prouver le caractère volontaire du sabotage, ce qui est totalement impossible.

La liste noire des SSII

Je n'ai qu'une réponse : légende urbaine inventée par les managers. Déjà parce que les SSII passent le plus clair de leur temps à se bouffer le nez, à se piquer des contrats, des clients et des prestas, il est inimaginable qu'elles s'entendent entre elles pour faire une chose pareille. Ensuite parce qu'un tel fichier serait illégal. Certes, ce n'est pas cela qui les arrêterait. Cependant, pour qu'un tel fichier ait le moindre intérêt, il faudrait qu'un grand nombre de sociétés et de chargés de recrutement y aient accès et puissent le remplir. Un complot de plusieurs dizaines de milliers de personnes... Difficile d'imaginer que parmi ces dizaines de milliers de personnes, il n'y ait pas eu un manager frustré, une RH outrée pour faire fuiter l'info, ce qui aurait été suivi par un scandale et des procès.

Si cette liste noire existait, le canard enchaîné en aurait fait part depuis longtemps.

Le monde est petit

Vrai et Faux.

Vrai parce qu'il arrive plus ou moins régulièrement de recroiser plus tard dans sa carrière un ancien collègue, manager ou pas. C'est l'une des raisons pour lesquelles il faut éviter d'avoir trop d'ennemis et proscrire les mails incendiaires ou toute ânerie qui laisse des traces facilement exploitables.

En revanche, croire qu'un troufion qui manage une équipe de 15 personnes sur un site de province chez SSII-lambda puisse ruiner votre carrière relève de la paranoïa au sens pathologique du terme. Oui, il a deux ou trois relations, il a des contacts avec les clients, il a des contacts en interne, il peut probablement vous pourrir en interne, ou au moins vous bloquer pour une promotion... ou pas d'ailleurs. Ce troufion a lui aussi des ennemis qui peuvent être contents de vous bombarder chef d'équipe pour lui pourrir la vie. N'oublions pas la politique.

Bref, ce troufion n'a pas la possibilité de savoir où vous postulez, il ne peut pas contacter vos futurs employeurs (ou si il le fait, c'est lui qui passera pour un c...). Certes, un employeur potentiel peut vous demander des références, mais vous avez dans ce cas deux lignes de défense en béton :

  1. Ne pas cacher le fait que ça se soit mal passé avec un manager, une entreprise, une école d'ingénieurs ou quoi que ce soit (sauf structure que vous avez quitté il y a 10 ans, ça n'a aucun intérêt). Le recruteur n'est pas crétin, il sait que les mauvaises ententes arrivent parfois. Si vous savez en parler de manière intelligente, ça peut même vous valoriser. 50% des candidats cachent ce genre de problèmes, 50% en parlent mal, ils taillent leur ancien employeur, ce qui est du plus mauvais effet. Si vous êtes capable de dire calmement que, avec X, ça s'est mal passé sans vous emporter, sans dénigrer, c'est un point de marqué.
  2. Ne pas donner le nom d'un type avec lequel vous avez eu de mauvaises relations. Vous êtes généralement libre de donner le nom de qui vous voulez, donnez celui d'un allié. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle je n'appelle jamais les anciens employeurs des gens que je recrute. Trop facile pour un candidat de donner le nom d'un allié, voire carrément le numéro d'un ami qui se fera passer pour son ancien manager.
J'ai gardé le plus beau pour la fin : le monde est petit pour tout le monde !

Aujourd'hui, vous êtes ingénieur de base sorti de l'école. Dans 5 ou 10 ans, vous aurez, vous aussi, fait votre trou quelque part. A ce moment là, vous serez peut-être fournisseur ou client de votre SSII, vous aurez peut-être devant vous, en entretien, votre boss actuel. Par ailleurs, vous connaissez peut-être du monde, vous aussi...

Celui qui vous sort que le monde est petit et que vous feriez mieux de faire attention n'est que votre n+1 ou n+2, rarement plus. Il n'a rien d'un grand manitou, il est parfaitement possible que vous soyez devant lui dans 10 ans.

C'est une chose qui m'est -presque- arrivé dans ma nouvelle boîte.

Un jour, un manager avec qui j'ai d'excellentes relations déboule à la machine à café :

_ Doug ? Tu était bien chez SSII-lambda avant ?

_ Oui, pourquoi ?

_ Tu connaissais pas X ?

_ Si, c'était un de mes chefs d'équipe, pourquoi ?

[Un chef d'équipe que j'avais eu alors que j'étais stagiaire]

_ Parce que je le reçois en entretien cet après-midi.

Le type en question était un de mes alliés chez SSII-lambda, j'ai donc parlé de lui en des termes élogieux. Si il avait été ennemi, je l'aurais déglingué proprement et il pouvait dire adieu au poste.

Depuis, j'ai commencé un nouveau sport : je fais téléphoner à mes anciens employeurs par des copains qui se font passer pour des recruteurs qui envisagent de m'embaucher. Je sais ainsi qui je dois démolir et qui je dois aider si, un jour, on me demande un avis sur un type ou sur une entreprise.

Un conseil pour quand vous aurez des petits jeunes sous vos ordres, comme c'est mon cas actuellement : ne soyez pas un manager tyran, vous ne savez ni qui vos petits jeunes ont dans leur carnet d'adresse ni où ils seront dans 10 ans. Ça grandit parfois vite ces bêtes là.

Conclusion : Bien s'entendre avec ceux d'en dessous, c'est intéressant aussi.

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S
Je suis tombé sur ton blog car je recherche du taf dans les I.T depuis quelques temps et comme etre un esclave derrière son ordi me soul vite au bout d'un an, je me casse et je les pourrit par mail et aux prud.<br /> Ca fait longtime que je cherche, et pourtant comme cette impression paranoïaque d’être blacklisté, je ne trouve rien. Après ca vient se plaindre qu'il y a du chomedu, j aimerais tapiner pour économiser et me barrer de ce pays malade mais plus je tapine plus je suis une pute du trésor public, donc impossible de mettre de coté à part pour notre bien aimé maquereau. Vive Paul Lafargue !!
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D
Bonjour,<br /> Si vous cherchez sur une ville de province en particulier, il est parfaitement possible que ce ne soit pas facile. Il n'y a peut-être pas 50 SSII ni même 50 boîtes qui font de l'informatique d'ailleurs. Par ailleurs, si le secteur métier est le même pour tout le monde, il y a fort à parier que les périodes creuses soient les mêmes pour tous. Dans ce cas, soit tout le monde recrute et vous trouvez du boulot en 15 jours, soit personne ne recrute et ça prend des années.<br /> Cela n'a rien à voir avec une éventuelle liste noire dont je doute fortement de l'existence pour les raisons évoquées plus haut.